Maison de retraite entrebâillée sur l’été

Publié le 20 Août 2016

Maison de retraite entrebâillée sur l’été

Les robes légères, les mini-jupes colorées et les tops à bretelles ont remplacé les tuniques blanches et les sabots hospitaliers. C’est le chassé-croisé des soignantes qui partent éreintées et reviennent avec la peau couleurs blé d’or et chaume doré.

Des grains de sable restent accrochés sur les joues veloutées des visages souriants, halés et reposés. Les yeux brillent de soleil et d’azur, ils reflètent l’eau limpide d’une cascade de montagne ou se ferment berçant à l’ombre d’un vieux fruitier. 

Les cheveux blonds, bruns ou auburn transportent des effluves marines et des embruns iodés. Les têtes bourdonnent de musique, de feux d’artifice et de cris d’enfants vidant l’océan.  

Les lèvres ont le goût de l’anis, des herbes de Provence ou du melon sucré, elles frémissent encore de baisers étoilés et de rires joyeux. Les souvenirs tout neufs se racontent à la pause-café ou se dévoilent en couleurs sur les réseaux sociaux.    

Mais il est temps de sortir en douceur de la lente torpeur des congés payés. Les bips stridents rappellent à l’ordre les tenues blanches qui se remettent en mouvement dans les longs couloirs encombrés.  

Maison de retraite entrebâillée sur l’étéMaison de retraite entrebâillée sur l’été

Quel constate entre les peaux bronzées et les teints translucides couronnés de fils blancs.  

Les personnes âgées regardent défiler, juin, juillet-août au bord de leurs maux.

Les gens n’ont pas bougé, ils sont restés figés dans des chambrettes aux volets clos. Par les persiennes entrebâillées, ils aperçoivent les fleurs assoiffées et les bancs désertés.

Malgré les trente degrés, ils ont froid sous les ventilateurs bruyants et ils boivent sans soif l’eau qu’on leur tend sans cesse.

Chaque jour, le facteur apportent des cartes postales de Pierre, Paul, Jacques; des grandes plages animées, des champs de lavande bleues ou des iles lointaines qui font briller leurs iris mouillés.

Le temps est magnifique, les enfants en profitent, on pense à toi papa.

Quelques dames papotent autour d’une petite table ou feuillettent sans fin la feuille de chou locale.

Quatre joueurs de cartes, belotent et rebelotent et chuchotent dix de der pour ne pas déranger deux petites dames frêles qui somnolent apaisées penchées en tête à tête.

L’euro, le tour de France et les jeux olympiques  s’agitent chaque jour sur le grand écran plat; un homme suit les exploits des sportifs français. Il hoche son menton, qu’il est loin le bon temps des Poulidor, Platini ou Mimoun. 

La porte de l’entrée est un sas de vie où les vieux suivent le balai des entrées, des sorties.

Eux restent côté cour,

les seuls qui ont gagné la rue de la liberté, nous ont définitivement quittés.

Maison de retraite entrebâillée sur l’été

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Publié dans #Soignants, #Résidents

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L
chouette chouette cet article, tu es toujours autant douée,c est trés imagé on s y croirait, merci véro pour ces fenêtres ouvertes sur nos lieux de travail, bisous
Cc Lisbeth et merci pour ton gentil petit mot. je prends toujours autant de plaisir à écrire...Gros bisous