La communication avec les résidents atteints de la maladie d’Alzheimer

Publié le 12 Février 2017

La communication avec les résidents atteints de la maladie d’Alzheimer

« Oui les malades Alzheimer parlent mais pour cela il est indispensable de parler avec eux » Michèle Grosclaude , psychothérapeute.

Communiquer avec une personne désorientée demande de savoir apprécier ses capacités, sa disponibilité et d’apprendre à la connaître.
Tantôt émetteur et récepteur, comment nous y prenons-nous pour partager une information, comprendre, nous faire comprendre des résidents atteints de troubles neuro-dégénératifs.
Les résidents atteints de maladie d’Alzheimer, s’ils ne saisissent plus les mots, sont extrêmement sensibles aux situations, aux émotions, comprennent, expriment et partagent beaucoup de choses.
Ce document n’est pas une recette infaillible mais donne des outils pour considérer chacun comme un interlocuteur à part entière, pour le retrouver dans ce monde parallèle où l’esprit se promène.

Entrer en relation

→Ne pas surprendre le résident, frapper à la porte, se présenter par-devant, entrer dans son champ de vision.

→Se placer à sa hauteur.

→Capter son regard.

Afficher un visage détendu.

Formuler des premiers mots positifs, une proposition d'aide, la perceptive d’un moment agréable : "Quel beau temps aujourd’hui" ou "Je suis bien contente de vous retrouver ce matin " et encore "Je viens vous aider pour votre toilette, nous allons passer un agréable moment".

Toucher le bras, tendre les mains pour amorcer le mouvement désiré.

Accepter que la personne nous « touche » en retour.

Et reconnaître la personne au-delà des signes de sa maladie

Les conversations du quotidien

Adopter un ton calme, joyeux, encourageant, bienveillant.

Ne laisser percevoir aucune impatience, colère ou autre sentiment négatif

Parler lentement.

Mettre le ton dans la voix.

Faire des phrases courtes pour entretenir un dialogue simple.

Laisser à la personne, le temps de répondre.

Ecouter ce que la personne exprime en retour.

Les sujets de conversation.

→Parler du temps, du lieu, de la végétation, des saisons, de l’emploi du temps du jour, ceci contribue à donner un orientation spatiotemporelle.

→Utiliser les éléments de la chambre, les photos, les bibelots, les magasines pour amorcer une conversation.

→Entretenir le dialogue même si apparemment ça n’a ni queue ni tête en ponctuant de : "Ah bon, c’est vrai, d’accord".

→Utiliser les codes conventionnels de politesse : "Bonjour, pardon, merci au revoir, à bientôt".

Se préoccuper du résident

Formuler des questions fermées où la personne pourra répondre par oui ou non.

Poser des questions à choix simple.

Si la réponse est hors contexte, ne pas insister sur l’erreur, reformuler et montrer que l’on a compris ce que la personne a voulu dire.

Bannir les "Vous vous souvenez" et les questions qui le mettrons en échec en demandant le noms des petits enfants par exemple.

Faire parler notre corps/être chaleureux

→Utiliser une gestuelle rassurante.

→Montrer.

→Mimer.

→Guider la main.

→Rendre le visage expressif.

→Moduler sa voix.

→Utiliser l’humour si la personne y est sensible.

Les mots qui nous gênent
Si le discours est hors sujet, si le résident a une idée fixe, partir par exemple, s’il est anxieux, agacé.

Ne pas essayer de le raisonner ni de mentir.

Montrer de l’intérêt, prendre en compte, rejoindre la personne c’est-à-dire valider ce qu’il dit.

Hocher la tête/toucher le bras.

Dire  par exemple : "Je sais, je comprends votre mère vous manque".

Parler au passé : "Comment s’appelait votre maman ?"

→L'erreur à ne pas commettre : "Votre mère est morte, il y a vingt ans déjà".

Reformuler : "Vous avez l’impression que", "Vous pensez que".

Trouver une diversion et en parler de façon affirmative par exemple :

Soignant :"Ah je vois que vous avez une photo d’Edith Piaf".

Résidente : "J’m'en fous pas mal, j’veux partir".

Soignant : "C’est votre chanteuse préférée je crois" en suivant l’image du doigt, en la commentant et en enchainant sur d’autres sujets.

Devant une opposition, donner le choix ou une alternative : "Vous préférez venir déjeuner avant ou après la toilette", "Voulez-vous démarrer seul ou avec moi".


Les questions répétitives
Il demande en boucle "On est où ici ?"

Ne pas dire : "Je vous l'ai déjà dit dix fois".

Ne pas s’énerver.

Trouver un sujet de substitution.

Lui renvoyer la question : "Vous pensez qu’on est où ?"

Proposer une activité flash.


Les gros mots/les insultes/l’agressivité

La réaction n’est pas contre le soignant mais en réaction à une incompréhension, à une situation vécue comme agressive, à une frustration, une gène…

Identifier l’élément déclencheur ou la gène (froid, chaud, constipation, soif…).

Garder son calme.

Se protéger, protéger le résident et les autres résidents.

Ne pas répondre sur le même mode.

Ne pas faire d’observations, gronder, crier.

Revenir plus tard lorsque le résident est plus calme.

Revoir son approche, son attitude, son ton de voix, les mots.

Trouver une diversion.

Si les situations sont répétitives, en parler à l’équipe, au médecin.

Comment dire non en douceur

Sans mentir chercher une formule, une périphrase pour détourner l’attention.

Utiliser le temps, l’heure tardive : "Il fait déjà nuit" ou "Il fait trop froid pour sortir","Je m’en occupe, ne vous inquiétez pas", "Tout ira bien","Je comprends", "Je me renseigne".

Comprendre le nouveau langage/le jargonnage

Aider à trouver les mots en incitant à montrer ce qui est souhaité.

Laisser le temps de parler, respecter le rythme.

Prêter les mots si la difficulté est trop grande.

Observer, écouter la nouvelle façon de parler, de communiquer.

Décrypter les mimiques, la gestuelle, le comportement.

Attraper les mots qui semblent importants pour le malade, leur donner du sens.

Rassurer l’interlocuteur sur sa place et son importance dans l’établissement.

La communication et son rôle social
Les personnes présentant des pathologies démentielles se recherchent, se font la conversation normalement même si vue de l’extérieur ça n’a pas toujours de sens.

Il faut donc :

Favoriser ces rencontres.

Respecter les nouvelles amitiés.

Rompre le monde du silence ou l’auto-feed-back
Lorsque le résident ne répond plus aux sollicitations, le soignant à tendance à intervenir en silence. Le risque est que le résident devienne objet et soit privé de communication donc déshumanisé.
Le principe de l’auto-feed-back est de nourrir la communication, de produire des stimulis.
Il s’agit d’annoncer et de décrire tous les gestes et de formuler des paroles positives.



L’expression des émotions
Les mots ont disparu, le résident ne reste pas moins un être humain communiquant.
La mémoire des émotions est toujours présente y compris à un stade très avancé de la maladie, nous, soignants, le constatons chaque jour au contact des résidents de nos établissements.
Au-delà d’apparences figées, il reste sensible à l’environnement vivant, aux objets de réminiscence.
Lui permettre d’entendre, de voir, de sentir, de toucher peut être vecteur d’expression et d’échanges avec autrui.
Un sourire en réponse à un sourire, des rires et des pleurs, des expressions de bien être ou de dégoût.
La communication, l’expression deviennent plus subtiles grâce aux regards, au toucher, à la tendresse et aux mots qui surgissent malgré tout alors qu’on ne les attendait plus.

Sources :
→Comment communiquer face au résident atteint de la maladie d'Alzheimer
de Jacques Selmes
→La méthode Humanitude de Yves Gineste et Jérome Pélissier
Validation de Noamie Feil
→La Clé des sens de Martine Perron
→Ces troubles qui nous troubles de Jérome Pélissier
→Alzheimer et communication non verbale de Cécile Delamarre

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Publié dans #Résidents, #Soignants

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